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Docteur Ali Afdjei

Chef du service des urgences, créé par ses soins il y a 21 ans, de la clinique privée de Parly 2, intervenant dans les médias au sujet de la crise, le Dr Ali Afdjei se signale par son affabilité et son humanité mises au service du prochain. Il est notamment le coauteur de Burn out : Le vrai du faux ! avec le Dr Alain Delabos et François Michalon, et de Yuki, le petit panda va aux urgences, écrit à l'intention des enfants.

1- Quel est votre parcours ?

J'ai été médecin à l'AP-HP, dans les établissements Ambroise-Paré (Boulogne-Billancourt) et Saint-Louis (Xe arrondissement). J'ai également travaillé au CHU Saint-Antoine (XIIe arrondissement). J'œuvre également pour l'ordre de Malte, et je suis intervenu à titre de médecin des catastrophes pour le tsunami en Asie du Sud-Est et le tremblement de terre en Inde, en 2004.

2- L'AP-HP est mise sur le devant de la scène par la crise. Que pensez-vous de cette institution ?

Après la faculté, on passe tous par l'AP-HP pour y travailler, on veut s'y incorporer. On y trouve des gens très différents, permettant un apprentissage exhaustif. Il faut garder ce statut d'un très grand hôpital pluridisciplinaire. En revanche, il n'y a pas de flexibilité pour faire de la recherche clinique par exemple, et il existe plus ou moins un système de cooptation qui peut bloquer des carrières lorsque des caractères trop différents se confrontent... La crise montre la nécessité de se réorganiser complètement, d'acquérir ladite flexibilité en adoptant un fonctionnement davantage transversal que pyramidal. Il faut également laisser les jeunes avoir des idées innovantes, pour créer de vrais centres de recherche. Le problème est qu'on ne fait confiance qu'à des gens qui ont des titres. Les décideurs sont formatés ainsi. C'est la même chose qu'au niveau de l'État : en ne se basant que sur la difficulté d'examens d'entrée à l'Ena ou ) Sciences Po, on laisse de côté des gens qui sont peut-être moins instruits mais ne sont pas forcément moins intelligents. Pourtant, ils auront beaucoup moins de chances de faire leurs preuves. À l'inverse, le système anglo-saxon par exemple permet de mieux travailler l'innovation : à titre d'anecdote, dans un MIT américain où j'intervenais, je voyais que certains étudiants jouaient avec des Lego ou des petites maquettes pour travailler leur créativité ! En France, on ne peut pas encore parler de déperdition de l'innovation, mais une lenteur s'installe, alors que les cerveaux sont là. Ce n'est pas une question de jeunesse ou de vieillesse...

3- À propos de jeunesse, vous avez un attachement particulier à l'enfance.

J'aime bien les enfants, je voulais faire orthopédie pédiatrique à la base. J'ai écrit l'histoire de Yuki le petit panda pour aider à lutter contre le stress et la douleur des enfants aux urgences. 10000 exemplaires, financés sur mes deniers, ont été distribués dans les Yvelines. Cela permettait que parents et soignants travaillent ensemble pour le bien-être des petits. Ce que j'aime bien avec ces derniers, c'est voir leur satisfaction immédiate après avoir été soignés, aux urgences. J'ai aussi un attachement plus large aux jeunes, puisque je suis également médecin du sport.

4- Un autre facette qui vous a fait beaucoup voyager.

En effet, dans le cadre de cette fonction, j'ai été médecin pour le Paris Dakar. L'idéal pour faire des voyages ! J'ai été amené à soigner localement les gens autour de l'événement, pas uniquement les sportifs. Il m'est ainsi arrivé d'avoir 80 malades par jour ! D'origine iranienne, j'ai toujours été attiré par l'international. Les voyages m'ont permis de voir différentes pratiques médicales, de constater évidemment des déficits criants en Afrique... La France a d'ailleurs un rôle à jouer, en rayonnant dans ces pays à travers la santé. J'ai des amis qui travaillent avec des ONG, et pour raisonner au-delà du cadre français,, je crois que le domaine de la santé peut aider à préserver l'harmonie dans le monde en apportant une parole apaisante. Je dis souvent que l'humanité est la croyance, la valeur qui m'anime. J'ai choisi un métier humain car rien ne vaut la vie et il faut avoir la conscience de ce que l'on vit. Rabelais nous dit que "science sans conscience n'est que ruine de l'âme", c'est une parole essentielle. J'ai d'ailleurs un projet d'écriture sur ce thème de la conscience, qui est en train d'être finalisé.

5- Mais cette "science" est très critiquée aujourd'hui...

Il est évident qu'une confiance doit être retrouvée. Les médecins sont des artistes, ils assimilent une science et doivent rayonner d'humanité dans la façon de la transmettre, de l'appliquer pour mettre en confiance les patients. Le problème est que l'on voit beaucoup sur les plateaux des techniciens, des "scientifiques" qui ne sont pas des hommes de terrain : ils s'ensuit une rupture de confiance, après leurs interventions, à cause du digital, car immédiatement toutes les infos se trouvent mélangées et aboutissent à faire des discussions sur les réseaux sociaux, alors que ce sont aux médecins de venir expliquer. Je prends l'exemple du pilote d'avion : celui qui présente et conduit l'appareil n'est pas celui qui construit les réacteurs ! Les "scientifiques", au sens des techniciens de laboratoire, des chercheurs, sont là pour traiter l'information brute, la vérifier pour savoir si elle est applicable, et non pour l'exprimer au risque de donner lieu à des débats litigieux et à des contradictions. La science demande du temps.

6- Pour autant, il faut aussi être réactif en temps de crise...

Et nous le sommes, puisqu'une étude menée à Parly 2 et à l'hôpital Lariboisière a mis en place, en collaboration avec la PME bretonne NG Biotech, un test sérologique pour la réponse immunitaire qui donne en 5 à 10 minutes une réponse, grâce à une piqûre au doigt. Il faut que les agences régionales de santé recommandent ce type de test, dont la population a davantage besoin qu'un vaccin, qui n'est pas un choix pragmatique. Mais on est en retard à cause de l'administration et de questions sécuritaires en décalage avec les nécessités du moment. Jamais un technicien de laboratoire, un "scientifique" ou un industriel n'est venu me questionner sur les besoins réels des urgences... Je prône la création d'un pôle de recherche et de diagnostic rapide, européen pourquoi pas, avec quelques scientifiques et NG Biotech, qui permettrait de travailler sur tous les types de maladies et d'étudier la façon de faire des tests adaptés pour une plus grande réactivité.

7- Vous aviez lancé également le projet de l'Emergency City Bike.

Pour sauver des vies, quelques minutes voire quelques secondes peuvent changer la donne. Pour un arrêt cardiaque, chaque minute perdue pour intervenir équivaut à 10% de chances de survie en moins. Une ambulance perd donc un temps très précieux. Emergency City Bike proposait de créer un binôme d'un motard spécialisé et d'un médecin pour arriver sur les lieux et pratiquer les premiers gestes élémentaires. C'est comme un Samu sur deux roues. La moto, une Goldwing standard, possède le même matériel qu'une ambulance : défibrillateur, respirateur, électrocardiogramme, perfusion... Elle peut intervenir en 4 ou 5 minutes au maximum, contre 10 minutes minimum pour une ambulance, avec un coût de fonctionnement 7 fois moins élevé ! Malheureusement, le projet a dû être interrompu faute de financements, l'éternel problème de la santé en France... Mais il pourrait tout à fait être relancé si les soutiens se présentaient !

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